Comment Briouze est devenue la capitale du sex-toy reconditionné ?
18 mars 2025 - Nos startups
Bénoni Paumier, 31 ans, a lancé son entreprise de reconditionnement de jouets intimes Rejouis, il y a tout juste un an. Le trentenaire, basé à Briouze, une petite ville de 1 500 habitants dans l’Orne, constatait que beaucoup de sex-toys dormaient dans les tiroirs. Il a donc eu l’idée de racheter des jouets intimes, les remettre en état et les revendre en ligne à un coût moins élevé. Depuis son lancement, Rejouis connaît une forte croissance et vient de convaincre le leader du marché français Passage du désir.
« Une croissance moyenne de 23 % »
L’engouement pour son projet, l’entrepreneur l’avait déjà bien senti avant de se jeter à l’eau. Le marché du sex-toy est en plein essor. « Les consommateurs aux États-Unis, Royaume-Uni et France possèdent en moyenne près de quatre sex-toys », selon l’étude du cabinet de conseil PwC. Le marché est estimé à 27 milliards de dollars en 2026.
Fallait-il encore franchir le pas. « Au début, je me suis posé la question, est-ce que je suis prêt à assumer ça ? Mais en fait, je développe une entreprise avec un impact social, écologique. Je me mettais des barrières. La sexualité, c’est positif, c’est du plaisir et de l’exploration, un sujet parmi tant d’autres », retrace-t-il.
Finalement, le doute s’est dissipé. L’entreprise a décollé rapidement. L’entrepreneur a fait appel à un médecin pour développer un protocole de nettoyage et travaille en collaboration avec l’université de Rouen sur une méthode plus industrielle pour ce protocole. Rejouis est aussi soutenu par plusieurs dispositifs d’aide à l’entrepreneuriat, dont la Banque publique d’investissement (BPI) France.
« Quand on s’est lancé, c’est parti très fort. La question était de savoir si ça allait durer ou si c’était un effet de mode. Les clients sont satisfaits et reviennent de plus en plus », constate Bénoni Paumier. En un an, Rejouis – seule entreprise de jouets intimes reconditionnés dans le monde, d’après les spécialistes rencontrés par Bénoni Paumier – a réussi à créer une filière. « On a sauvé 1 500 objets et ça augmente, avec une croissance de 23 % en moyenne depuis la création. » Certains clients commandent d’Espagne, d’Allemagne, ou de Belgique.
« On est hyper contents, on embarque avec nous le leader du secteur »
Quelques mois après la mise en ligne du site, il a déménagé – toujours à Briouze – dans un local plus grand où les jouets sont réceptionnés, triés, nettoyés et renvoyés. Dans son laboratoire, avec une machine spécifique, il peut donner une seconde vie à vingt sex-toys à la fois, contre seulement un à ses débuts. Deux salariés et trois personnes en freelance ont été recrutés.
Contrairement aux idées reçues, les clients ont un profil varié de 20 ans à 69 ans et une parité hommes et femmes. Tout n’a pas été rose, notamment sur la communication. Les réseaux sociaux ont des règles strictes et se faire connaître dans ce domaine n’est pas chose aisée. « On doit cacher nos jouets, ne pas utiliser le terme sexe ou sex-toy. Je ne m’attendais pas du tout à ça, il y a encore ce tabou. »
Un partenariat avec un leader du secteur
Le leader du secteur Passage du désir a très vite remarqué le potentiel de Rejouis. Fondée en 2007, l’entreprise parisienne a repensé le sex-shop classique en se démarquant de l’image parfois peu reluisante de ces boutiques. « On a discuté l’été dernier. Ils n’avaient pas de solution de recyclage allant jusqu’au reconditionnement. On s’est rendu dans leur entrepôt, on a fait des tris, on permet d’alléger leur quantité de déchets », dit Bénoni Paumier, ravi.
Un partenariat s’est noué. « Nous sommes fiers de contribuer à la réduction des déchets dans un secteur encore trop peu sensibilisé à ces enjeux », déclare Patrick Pruvot, fondateur de Passage du désir, dans un communiqué de presse.
Dans les prochaines semaines, Passage du désir proposera des sex-toys reconditionnés par Rejouis sur sa propre plateforme.
