StartUp VS FinishUp
29 avril 2021 - Blog
Mais au fait, c’est quoi une startup ?
Des GAFAM au site e-commerce digital native du coin, le mot « startup » est aujourd’hui accolé à tout type d’organisations, comme un label parfois instrumentalisé de manière positive et ambitieuse, et d’autres fois négatives.
En tant qu’accompagnante des startups, cette utilisation politique du mot me fait une belle jambe à vrai dire. Certes, elle alimente les débats mais n’aide ni les startups ni les accompagnants à comprendre leur contexte et à se situer dans leur pratique…
Alors, c’est quoi une définition utile d’une startup ?
Une startup, ce n’est pas une finishup
Voilà le commentaire d’Alain Cardon que j’entends au détour d’une formation de coaching. Sous-entendu : ces jeunes entreprises savent commencer mais savent-elles terminer voire concrétiser ? Forcément je me sens directement concernée, dans les starting-blocks prête à répliquer (quand même c’est mon métier !).
Mais à bien y réfléchir, Alain n’a peut-être finalement pas si tort que ça…
Des organisations provisoires conçues pour rechercher un modèle économique stable et scalable
C’est la définition la plus communément admise d’une startup, popularisée par Eric Reis. Si je tente de le traduire à ma sauce, je serai tentée de dire que les startups sont des véhicules spécialement conçus pour livrer des innovations* sur le marché….
Je m’explique. Entreprendre quelque chose d’innovant, c’est frapper à la porte de dame Incertitude. La « nouveauté » est telle qu’aucune donnée statistique ou aucun calcul de probabilité ne permettent de manière réaliste de déterminer le résultat (prévisions de ventes…) ou le plan de route pour l’atteindre (cible client, prix, fonctionnalités…).
Contrairement aux entreprises « classiques » (et j’écris cela sans connotations péjorative aucune), les grandes mécaniques et facteurs de succès propres à chaque startup sont inconnus et flous et c’est justement cette formule presque magique qu’elles doivent découvrir pour elles-mêmes.
PS : Eh oui, si vous me suivez bien, le corollaire à tout cela c’est bien que les instruments « classiques » de la création d’entreprise, des 5P du marketing-mix en passant par les études de marché telles qu’on les apprend à l’école, ne sont d’aucune utilité aux startups… Ils peuvent même lui être nuisibles.
* Définition de l’innovation : capacité à créer de la valeur en apportant quelque chose de nouveau dans un domaine donné tout en s’assurant que l’appropriation de cette nouveauté se fasse de manière optimale
L’art de commencer
Alors oui, une startup ça doit maîtriser l’art de bien commencer.
Imaginez cette scène : vous devez vous rendre à un endroit en ayant seulement une direction très vague en tête (innovation) sous un brouillard (incertitude) tellement épais que vous voyez à peine le bout de votre nez. Vous pouvez toujours tenter de prendre un GPS en renseignant une direction à la louche (une étude de marché, au hasard), mais il y a un danger certain à suivre à la lettre le plan de route ainsi tracé. Vous risquez au mieux de vous perdre, au pire de vous prendre des arbres de plein fouet ou de tomber dans un ravin.
L’art de commencer de la startup, c’est l’art de prendre des hypothèses éclairées sur la direction à suivre, de faire un bout de chemin assez restreint et de corriger la direction à chaque obstacle ou nouvelle information rencontrée…
PS : Dans le langage des grands gourous business, on appelle cela le « Lean Startup ». Chez Normandie Incubation on aime particulièrement cette lecture.
PPS : Si vous ne l’aviez pas encore compris… Ici, c’est VOUS l’étude de marché.
L’art de terminer ?
Vous noterez tout de même qu’une startup est une « organisation provisoire conçue pour rechercher … » et donc j’ose espérer que le but et la philosophie générale c’est d’abord de « trouver » pour sortir de cet état de startup, puis de faire se transformer l’organisation en PME ou grand groupe pour soutenir la croissance et la pérennité.
Un vrai exercice d’équilibriste, avec des dangers qui guettent des deux côtés de la ligne !
- D’une part celui de ne pas « trouver » conduisant à la mort du projet ou à son emprisonnement dans un état « provisoire » perpétuel, créant certes de la valeur à coup de levées de fonds successives mais à quel prix ?
- D’autre part celui de trouver et d’entrer dans un espace moins incertain et plus normalisé caractérisé par un jeu à somme nulle et à variables restreintes où chaque concurrent ne peut plus imaginer croître qu’en piquant des parts de marché aux autres… Sans vouloir dénigrer cet état de fait, pour moi ce « terminer » a tout de même un petit goût amer de « fin ».
Mais si ces anciennes startups arrivent à consolider leurs innovations et à construire sur cette base stable pour aller explorer d’autres contrées qu’elles consolideront à leur tour, alors on entre dans un espace de création de valeur sans limite.
Alors, c’est quoi une startup ? C’est un devenir incertain, ni tout à fait mort, ni tout à fait vivant, ni tout à fait startup, ni tout à fait finishup, ou bien même les deux à la fois ?